Le carnet incarnat

Fragments érotiques

Deux-cent-onze.

Sa démarche est aussi féline que le motif léopard de sa micro-jupe. En déposant son joli popotin sur le tabouret du bar de l’hôtel, elle secoue ses cheveux pour que l’homme assis à côté d’elle, puisse en recevoir la brise parfumée – un geste qu’elle devait avoir déjà pratiqué mille fois. Puis, tout sourire, elle dit à l’étranger :

— Bonsoir chéri.

— Bonsoir, répondit-il poliment.

— Tu as envie de me baiser?

— Hein?

— Oui. Tout de suite. Je ne te demande rien en retour… sauf une toute petite chose : mon mari va nous regarder. C’est notre petit fantasme à nous deux, ça nous permet de mettre du piquant dans notre couple. Tu vois, là-bas, près de la porte? C’est lui qui nous attend.

— C’est très tentant, mais…

— Ne me dis pas que tu es timide, hein…

— En fait, oui, je le suis, mais ce n’est pas pour ça. C’est juste que… dans cinq minutes, je suis censé monter à ma chambre pour regarder ma femme faire l’amour avec un type qu’elle a dragué ici-même, dans ce bar.

— Euh… Tu me niaises, là?

— Pas du tout. Je pense d’ailleurs que je vais y aller tout de suite. Vous arriverez plus tôt, la prochaine fois: les meilleurs taureaux partent toujours très vite.

Assise à deux tabourets d’elle et n’ayant pas perdu une miette de leur échange, je ne peux m’empêcher de pouffer. Je commande un Aperol spritz et, en lui remettant, lui dis :

— La soirée sera longue, vous allez en avoir besoin.

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